Compte-rendu de la CSW62 ("Commission de la condition de la femme" à New York)



Coordination française pour le Lobby Européen des Femmes

Association Loi 1901

ONG en statut consultatif avec l’ECOSOC des Nations Unies

ÉGALITÉ DES DROITS ET DES CHANCES POUR TOUTES LES FEMMES

EN FRANCE, EN EUROPE, DANS LE MONDE


Compte-rendu rédigé pour l'AG de la CLEF par Moïra Sauvage

Rappel : Chaque année, Commission sur le statut de la femme, deuxième semaine de mars, se base sur CEDAW et sur Plateforme d'action de Pekin, et sur les objectifs du millénaire. La CLEF y participe depuis de nombreuses années dans le cadre de la délégation française des ONG.

Présence de la CLEF :
La CLEF a organisé cette année quatre ateliers, l'un en tant que « side event » à l'intérieur de l'ONU, un autre dans les locaux de la représentation de l'Organisation de la Francophonie aux Nations Unies, les deux autres dans le cadre des « parallel events » des ONG.
Comme chaque année, notre délégation a pu assister à de nombreux ateliers organisés par les 8000 déléguées d'associations du monde entier, occasion de découvrir leur travail et des sujets que nous ne connaissions pas. Un lieu de rencontres, donc, unique au monde.

- Notre déclaration préalable
La CLEF y a souligné le nécessaire changement de mode de production agricole pour une plus grande égalité entre les femmes et les hommes dans la perspective de l’agenda 2030.
La notion d’espace rural est une notion en évolution permanente et sa définition change selon que ces territoires sont plus ou moins éloignés des pôles urbains.
On évalue à seulement 10 % le nombre de femmes accédant à la terre alors qu’elles couvrent 50 % des besoins alimentaires par leur travail dans le monde.
En France, le renouvellement des agriculteurs est caractérisé par une forte reproduction des lignées masculines, puisque seulement 13% des filles figurent parmi les « héritières » agricoles.
Par ailleurs, pour répondre au besoin d’accroître de manière indéfinie les rendements agricoles, la France consomme 80 000 tonnes de pesticides par an. Elle en est le troisième utilisateur dans le monde et le premier dans l’Union Européenne.

Nos recommandations :
- Mettre en oeuvre des statistiques sexuées fiables
- Assurer des revenus décents aux agricultrices, et une pleine protection sociale et des retraites
- Mettre en place des programmes d’informations, de sensibilisation et des formations à l’égalité des chances
- Assurer des revenus décents aux agricultrices, et une pleine protection sociale et des retraites
- Développer une agriculture inclusive, biologique et raisonnée
- Rencontre avec Marlène Schiappa et l'ambassadeur de la France à l'ONU.
Mme Schiappa nous annonce une bonne nouvelle : l'utilisation dorénavant de l'expression « Droits humains » par le MAE et l'abandon de celle de « Droits de l'homme ».
Elle est cependant inquiète car :
- La question des Droits sexuels et reproductifs devient cruciale car elle est de plus en plus remise en cause au niveau mondial
- Grand besoin donc de vigilance, et besoin de s'associer avec les autres états progressistes, France doit préserver, développer, et renforcer les DSR dans le monde
- La notion de laïcité qui reste très française et incomprise : à défendre par tous les moyens !

L'ambassadeur parle ensuite du contexte spécialement difficile : de nombreux pays d'Afrique, le monde arabe, la Russie, et le Vatican sont opposés à France, ainsi que les USA de Trump, s'y ajoutent certains pays d'Europe comme la Hongrie et la Pologne... Les avancées de Pékin sont donc plus difficiles que jamais à conserver !

D'autre part la place de la société civile est de plus en plus difficile à faire respecter (par exemple les défenseures des droits des femmes)
France a réussi à réussi à introduire le harcèlement, l'accès à la propriété de la terre, l'enregistrement des naissances et la lutte contre les violences dans les négociations, mais elle a besoin de l'aide des pays africains sur les violences et sur la lutte contre les stéréotypes.

Heureusement, le problème de l'environnement est très présent
Nos ateliers, organisés conjointement avec le LEF, la fondation Jean Jaurès, et la plateforme Genre et développement :
- Transition écologique et climat : les femmes rurales en première ligne
La représentante du MAE a exposé la nouvelle stratégie du MAE : dépasser les enjeux du simple développement en intégrant la nécessité de l'égalité entre femmes et hommes comme un levier essentiel pour faire bouger les choses. En insistant, plus que sur la simple coopération avec l'Afrique, sur le fait que c'est un enjeu mondial. Dorénavant, 50% de l'aide de la France sera axée sur le genre : éducation des filles, droits sexuels et reproductifs, autonomisation économique et lutte contre les violences.
L'AFD développe un exemple, en Colombie, de plan de développement rural intégré
La sénégalaise Daouda Diop souligne les répercussions locales des transformations du climat : remontée des eaux qui noient des champs, raréfaction de l'eau ailleurs, qui obligent les femmes à marcher des heures pour en trouver...Elle souligne l'importance des responsabilités à donner aux femmes pour que cela change dans leur vie quotidienne !
Jusqu'à maintenant, dans le monde : 100 milliards ont été dédiés à lutte contre le changement climatique, dont seulement 0,1% qui prennent en compte l'égalité femmes hommes...
- Accès à la terre et à la maîtrise de son corps pour chaque femme
Seulement 16% des femmes possèdent la terre !
Interventions de femmes de terrain de Madagascar et du Maroc où l'héritage exclut les femmes, du Planning France et du Burkina Faso qui soulignent les disparités entre pays pauvres et Occident, et le besoin primordial d'une éducation à la sexualité et aux droits sexuels et reproductifs, en rappelant que 43% de la population mondiale a moins de 18 ans...et que 60 millions de filles sont mariées encore impubères, que 5 millions d'adolescentes sont enceintes, et que 30% des filles disent que leur premier rapport a été forcé...
- L'impact du changement climatique sur les femmes et les filles en milieu rural
Atelier organisé à la suite de la publication du « Livre blanc » sur femmes, santé et climat avec des témoignages et des engagements de personnalités sur le sujet, réunis par l’association Supplément d'Elles, membre de la CLEF.
Interventions d'ONU femmes, de l'institut européen de la Méditerranée, du LEF, de l'Unicef et du Haut conseil à l'égalité, ainsi qu'une intervention vidéo de Marlène Schiappa, enregistrée à l'avance.
Le but de l'atelier était de montrer comment, sur place, on peut agir : d'un douar au Maroc où, avec participation des habitants, une caravane de sensibilisation a été organisée, à la mise en place d'un système de jeunes « you report », qui sensibilisent les jeunes à ce problème autour d'eux et le rapportent à l'Unicef, en passant par l'installation en Zambie de relais écologiques et la diffusion d'une bande dessinée, les exemples furent vivants et multiples. A été également souligné le besoin d'utiliser les savoirs ancestraux des femmes pour trouver des solutions, mais aussi les formations utiles à toutes, comme ces femmes âgées en Inde à qui on a appris comment se servir de panneaux solaires (ONU femmes), ou la nécessité d'apprendre à nager aux femmes après des inondations au Vietnam (ONU femmes)...

- « Brisons le plafond de verre ! » : les femmes en politique. Atelier organisé par la Suède et la France, le LEF, et la fondation Jean Jaurès avec des interventions de Côte d'ivoire, du Maroc, d'un représentant de l'ONU, et de deux ministres : Mme Schiappa pour la France et Pernilla Baralt pour la Suède.
De deux femmes sur 255 députés en Côte d'Ivoire à 43% de femmes parlementaires en France en passant par 20% en Suède, on constate beaucoup de disparités... Il semble que la Suède ne doive plus être considérée comme un modèle lorsqu'au Maroc on constate qu'il y a aujourd'hui 22%de femmes au parlement.
Les interventions le confirment, c'est encore partout difficile pour les femmes en politique : insultes, critiques sur les réseaux sociaux, c'est toujours le sexisme et le harcèlement qui dominent.

Conclusion : plus qu'un seul problème pour les femmes, c'est un problème de démocratie lorsque 50% population ne sont pas -ou mal- représentés :

Bilan
Les conclusions agréées de la CSW n'ont pas encore été publiées officiellement mais il semble que sur les droits sexuels et reproductifs le texte ne soit pas revenu en arrière...
Pour finir, quelques bonnes nouvelles :
- La nouvelle directrice exécutive de UN Women vient d'être nommée, il s'agit de l'ex-ministre suédoise des droits des femmes, Asa Regner, une féministe déclarée.
- « Je suis féministe ! » a déclaré le secrétaire général de l'ONU, Antonion Guterres lors de la cérémonie d'ouverture. Plus tard, il a affirmé aux ONG son souhait de purger le système de l'ONU de toute forme de violence masculine et de harcèlement. Il a aussi invité les ONG à « lui rendre la vie difficile » en lui réclamant des comptes tout au long de son mandat. Ce qu'avec d'autres nous ne manquerons pas de faire !

Et demain ?
La question qui se pose, comme chaque année, est : comment rendre effectives les conclusions de cette CSW ? Comment continuer à faire entendre nos priorités pour 'anniversaire de Pékin+25 en 2020 ?
Le fait est qu'il est hors de question d'attendre encore 217 ans – comme le prévoient les statistiques au rythme actuel- pour obtenir l'égalité entre les sexes !...

CLEF - 6 rue de la Rochefoucauld 75009 Paris – Tél : 01 55 50 45 64
clef.femmes@gmail.com